Nouvelles solutions végétales pour toits et murs végétalisés
Réunis depuis 2009 en Réseau du Bâtiment Durable, les pôles de compétitivité tournés vers l’éco-construction et l’innovation durable ont choisi de tenir leur Forum du Bâtiment durable les 2 et 3 février à Angers, siège de VEGEPOLYS, pôle de compétitivité à vocation mondiale du végétal spécialisé. Un signe fort pour la filière du végétal, d’autant plus qu’à cette occasion, VEGEPOLYS et les pôles de compétitivité de l’éco-construction viennent d’officialiser leur charte de collaboration au Réseau Bâtiment Durable. Parmi ces pôles signataires, l’intégration de VEGEPOLYS au Réseau Bâtiment Durable montre l’intérêt du secteur du bâtiment pour les solutions végétalisées (toits, murs…) ou à base de végétal : le génie végétal s’allie désormais au génie civil dans la droite ligne du Grenelle de l’environnement pour concevoir des bâtiments basse consommation. Fédérant des organismes issus de plusieurs filières du végétal, VEGEPOLYS développe l’innovation autour des végétaux, notamment dans des situations urbaines : toitures, murs, ou encore éco-quartiers, en s’appuyant sur son centre technique Plante & Cité, véritable ingénierie de la nature en ville. (A droite : essais sur les toits d’Agrocampus Ouest - Angers INPH, diversification de la gamme végétale pour les toitures).
Le Réseau Bâtiment Durable
Le Réseau Bâtiment Durable rassemble des pôles de compétitivité depuis juin 2009 et a pour objectif de donner une vision technologique prospective du bâtiment en valorisant les projets de R&D, en développant et favorisant de nouvelles collaborations et initiatives au service de l’innovation durable dans le bâtiment, en collaboration étroite avec le Ministère de l’Environnement, du Développement Durable, des Transports et du Logement.
Le Forum Bâtiment Durable d’Angers le 2 et 3 février est aussi l’occasion pour les pôles signataires d’entériner officiellement la charte de collaboration du Réseau Bâtiment Durable.
Le secteur du bâtiment représente 40% de la demande des énergies en Europe. En France, les bâtiments résidentiels et tertiaires sont les plus consommateurs d’énergie (44%) : ils représentent la 3e source d’émissions de CO2 (23%) ; le chauffage étant le plus énergivore, avec presque trois quarts des consommations d’énergie, selon le ministère de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement.
A l’inverse, en comparaison avec d’autres secteurs, les réductions de consommation d’énergie et d’émission de CO2 des bâtiments sont aujourd’hui les plus significatives avec notamment l’apparition de maisons passives. Depuis le Grenelle, l’enjeu est de taille et le secteur en perpétuelle recherche d’innovation. La priorité est donnée à l’éco-conception dans laquelle le végétal a toute sa place via les toits et façades végétalisées.
Très ancienne technique de protection de l’habitat, le toit végétalisé consiste à recouvrir un toit plat ou à pente légère d’un substrat planté de végétaux. Cette pratique réintroduite dès les années 70 en Allemagne ou dans les pays scandinaves, représente aujourd’hui une technique qui s’inscrit parfaitement dans une démarche HQE.
Un pouvoir d’isolation
Outre leur excellente isolation acoustique (environ 32dB en isolation phonique et 20dB en absorption phonique), les toits et murs en végétal présentent de nombreux avantages thermiques en régulant les fluctuations de températures. Ils offrent une bonne inertie et un fort pouvoir isolant notamment contre le soleil : l’apport d’une végétalisation génère une économie de 20 % à 30 % sur l’exploitation de la climatisation du niveau situé sous la toiture, selon le rapport du LEPTIAB de La Rochelle et du CRITT Horticole (Association Régionale de Recherche et de Développement horticole), membre de VEGEPOLYS.
La recherche et l’innovation : un enjeu
Alors que les toits et façades végétalisés offrent une meilleure isolation thermique et phonique des bâtiments, une meilleure gestion des eaux de pluie et une intégration paysagère, les recherches en la matière démarrent tout juste. Actuellement toute la problématique consiste à étalonner des échelles de mesure pour les maîtres d’Å“uvre. Le faible développement en France des toitures végétalisées extensives est bien souvent lié à la méconnaissance technique des maîtres d’ouvrage et prescripteurs.
L’enjeu à court terme est de mettre à la disposition des professionnels du bâtiment, maîtres d’Å“uvres, architectes, promoteurs, bureau d’études, des procédés, des sélections de végétaux… Intégrer le végétal, matière vivante, à la ville et au bâtiment est un domaine d’expertise à part entière. En aménagements urbains, diversifier la maîtrise d’Å“uvre avec l’appui de professionnels du végétal est un gage de plus-value pour le projet. Travailler avec la recherche et l’expérimentation du végétal spécialisé et de la nature en ville développera et structurera le potentiel des projets innovants. (A droite : site d’essai).
Impulsion de VEGEPOLYS
Comment trouver des passerelles efficientes, un jargon commun ? Comment cette filière de murs et toitures végétalisés peut répondre efficacement à l’offre d’un secteur ficelé par des normes sécuritaires ou écologiques strictes ? Faire en sorte que le génie végétal rencontre le génie civil est l’un des chantiers actuels de VEGEPOLYS.
Un programme d’expérimentation national initié par Plante & Cité a pour objectif de proposer aux professionnels de nouveaux types de végétaux. L’enjeu ? Déterminer les espèces adaptées à différentes régions climatiques, montrant une résistance à la sécheresse ou capables de se développer sur un substrat de faible épaisseur.
Sur 63 espèces testées sur les deux premières années, sur 4 sites au climat bien différent (Angers, Antibes, Jouy-en-Josas et Lyon), 16 ont été retenues pour leur résistance à la sécheresse (zéro arrosage) et leur absence de besoins en intrant.
inancé par l’interprofession Valhor, ce programme de diversification est très attendu par les professionnels du végétal qui commencent, pour certains, à utiliser ces nouvelles espèces. (A gauche : exemple d’une espèce ayant montré de bons résultats d’adaptation en conditions limitantes en eau.)
Plante & Cité : Ingénierie de la nature en ville
Plante & Cité est le centre technique national d’études et d’expérimentations sur les espaces verts et le paysage reconnu par l’interprofession Val’hor et par les ministères en charge de l’agriculture (MAAPRAT) et de l’Ecologie (MEEDDTL).
Initié à Angers, dans le cadre de VEGEPOLYS, pôle de compétitivité du végétal, Plante & Cité s’est construit en partenariat avec les établissements de recherche, les services des espaces verts des collectivités et les entreprises de l’horticulture et du paysage. Créée en 2006, l’association bénéficie du parrainage de l’Association des Maires de France (AMF). Elle est présidée par Jean-Claude Antonini, maire d’Angers ; Le premier vice-président est François de Mazières, maire de Versailles ; le second vice-président est Eric Lequertier, directeur d’une entreprise de paysage.
Plante & Cité développe la recherche et l’expertise pour apporter des réponses nouvelles et innovantes pour l’aménagement et la gestion des espaces verts dans la perspective du développement durable. www.plante-et-cite.fr
e plus, Plante & Cité mène une veille scientifique et technique sur l’évaluation du potentiel de biodiversité des toitures végétalisées à l’échelle nationale et internationale. Un suivi de la biodiversité flore et faune autour des végétaux testés est intégré au protocole des essais. Au niveau de la faune, on observe une différence entre celle présente sur toit nu et sur toit végétalisé. Sur le site d’Antibes par exemple, outre la présence de pies, tourterelles et pigeons, des rouges gorges, mésanges noires, fauvettes mélanocéphales ont été observées sur la toiture végétalisée et dans son environnement proche.
Le CRITT Horticole, adhérent de VEGEPOLYS avec lequel Plante & Cité collabore pour mutualiser les résultats, annonce comme très prometteur une variété d’Å“illets qui s’est distinguée, permettant aux professionnels de proposer une floraison à l’année. En effet, ce CRITT effectue, à Rochefort-sur-Mer depuis 1989, un travail de recherche pour mettre ses innovations et moyens techniques à disposition des entreprises de la filière. Dernièrement, les ingénieurs du CRITT Horticole ont mis au point un substrat, de nouveaux matériaux, et ont rédigé un Cahier de prescription de pose. La station souhaite à terme créer une boîte à outils sur les toitures végétalisées équivalente à celles sur le chauffage, la climatisation ou l’isolation.
Côté entreprise
Certains professionnels comme Amaeva, jeune entreprise, proposent aussi des toitures multicolores fleuries et avec du volume. « Grâce à une base de sédum tapissant mélangée avec des vivaces fleuries et des graminées, nous proposons des toits très esthétiques  », explique Anne-Laure Lallemant, biologiste spécialisée en ingénierie de l’écologie. Pour l’un de ses projets, l’entreprise a même imaginé un dessin végétal reproduisant le nom de la société du client. Un effet désormais possible grâce aux modules indépendants et facilement interchangeables de Novintiss. Ce procédé novateur vient également d’tre installé sur les toits des nouveaux locaux de l’entreprise : un test grandeur nature pour sélectionner les nouvelles espèces végétales. (A gauche et à droite : murs et toits végétalisés Amaeva).
Des murs design en extérieur comme en intérieur
Récompensée à de nombreuses occasions pour ses innovations, la petite entreprise Héliotrope, spécialiste de murs végétaux pour l’architecture et la décoration, imagine aussi des cloisons amovibles ou éléments séparatifs pour l’intérieur ou l’extérieur. Des éléments idéaux pour des lieux en recherche de convivialité et de calme, tels que les terrasses de restaurants ou de cafés, les jardins d’enfants… Ils peuvent intégrer plus de 30 espèces en intérieur (où les principales contraintes seront le manque de lumière) et autant en extérieur. (A gauche et à droite : murs végétalisés Héliotrope).
Des professionnels de végétaux pour les murs et toitures
Les pépinières RENAULT sont basées en Mayenne et fournissent des paysagistes et des étancheurs en plantes pour les toitures végétalisées ceci depuis dix-neuf ans. Thierry Renault a connu la monoculture du sedum et fait partie aujourd’hui de ces professionnels cherchant à élargir leur gamme depuis trois, quatre ans pour répondre à la demande des architectes-paysagistes. « Si de nombreux étancheurs ont fait le choix du végétal sur les toits c’était au début pour protéger leur étanchéité des rayons du soleil et ainsi allonger leur durée de vie (2 à 3 fois plus long pour un toit terrasse) et non pour des raisons esthétiques, ces derniers se contentaient donc de sédum », explique Thierry Renault. « Aujourd’hui la demande des paysagistes et des étancheurs est plus pointue, plus diversifiée. Nous utilisons déjà chez nous des graminées : festuca glauca ou stipa tenuifolia ou des vivaces comme les dianthus (Å“illet) ou potentille…  » (A gauche et à droite : "Manuplac" et toiture extensive des pépinières Renault).
Une occasion en grand lui a été donnée en décembre dernier par la ville d’ANGERS lors du projet toujours en cours de végétalisation du tramway où il a pu tester des variétés de menthe ,thym, origan et petrorhagia saxifraga, en essai aujourd’hui sur ses productions dédiées aux toits. « De notre côté la monoculture n’est pas souhaitable non plus, car trop risquée en terme de maladie  », conclut ce chef d’entreprise dont 30% du chiffre d’affaires provient de l’activité toiture. Dernier challenge en date de cette structure de 41 salariés : tester et adapter pour un client, une vingtaine de nouvelles plantes.
Micro-mottes, tapis, fragments de végétaux… Les pépinières RENAULT propose des plants sous toutes les formes, et depuis trois ans en association avec un plasturgiste (pot et conteneur) et l’étancheur MEPLE, il propose une plaque pré-cultivée : la Manuplac. « Aujourd’hui nous vendons 30000 m2 dans ce format fait de PEHD recyclé. Ces dalles d’environ 50 cm de côté, pré-cultivées (80% de recouvrement), sont faciles à poser, s’emboitent entre elles et ont une rétention en eau adaptée grâce à la qualité du substrat et les particularités physiques de la plaque  », explique cet expert en végétal.
Déjà naturellement isolants thermiques, les murs végétaux conçus par Héliotrope peuvent aussi être à isolation renforcée. Le procédé utilisé est une structure ménageant une lame d’air de 5 à 16 centimètres entre la façade et le mur végétalisé. Selon les projets architecturaux, cette lame d’air peut intégrer un isolant supplémentaire. Toujours chez Amaeva, avec leur partenaire Novintiss, des modules muraux, complètement étanches, ont été sélectionnés pour leur gestion fine de l’eau (ils ne nécessitent pas de récupérateur d’eau). Mais sur le long terme, la clef reste l’entretien qui doit être fait par des professionnels (surtout les deux premières années) et la gestion de l’eau en amont. Héliotrope prévoit un circuit d’irrigation piloté à distance tandis que Amaeva utilise les modules muraux complètement étanches.